- CINÉMA - Droit du cinéma
- CINÉMA - Droit du cinémaLe droit du cinéma est constitué par l’ensemble des règles juridiques qui régissent la production, la distribution et la projection des films. Il concerne le film aussi bien comme création artistique (œuvre cinématographique) que comme marchandise (pellicule impressionnée).Étant à la fois une industrie et un art, le cinéma pose des problèmes juridiques tant au niveau de la création du film qu’à celui de son exploitation. La production met en œuvre des capitaux considérables dont la rentabilité, nécessairement à long terme, est aléatoire: des contrats sont passés entre producteur, studios, laboratoires; le crédit doit intervenir pour le financement. La création de l’œuvre cinématographique requiert le concours d’un grand nombre de personnes qui apportent leur contribution intellectuelle: metteur en scène, scénariste, dialoguiste, compositeur, acteurs; tous sont dans une situation contractuelle avec le producteur; comment peuvent-ils prétendre avoir un droit d’auteur? La distribution par démarchage des salles et diffusion des copies de films implique la conclusion de nombreux contrats. La projection du film constitue un spectacle qui réunit dans les salles de nombreux spectateurs; de ce fait, l’ordre public est directement intéressé. Lois et règlements de police s’appliquent au spectacle, de même que lois et règlements financiers à l’industrie.Selon les systèmes juridiques, des solutions différentes sont données à chaque problème; mais l’élargissement des marchés du film a rendu nécessaire l’établissement, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, de règles internationales, qui ne peuvent que marquer profondément l’évolution future du cinéma dans les pays de la Communauté économique européenne, malgré le déclin subi par l’industrie cinématographique dans les pays industrialisés – déclin imputable à l’essor de la télévision et d’autres formes de loisirs.1. Les professions cinématographiques et l’ÉtatC’est à René Clair qu’on attribue l’expression: «Le cinéma devient affaire de gouvernement.» Selon les pays, le cinéma est affaire soit d’organismes publics, soit d’entreprises privées, soit d’une action conjointe des organismes publics et des entreprises privées.Le cinéma, entreprise publiqueDans les pays socialistes qui ne sont pas passés à l’économie de marché, production, distribution et exploitation des films sont le fait des entreprises publiques. L’enseignement cinématographique et la formation professionnelle sont assurés dans des instituts d’État. Le cinéma est conçu comme un aspect essentiel du service public de la culture nationale et populaire.Le cinéma, entreprise privéeL’intervention de l’État est alors réduite au minimum.Aux États-Unis, le cinéma fut, dès sa naissance, une grande industrie intégrée verticalement. Les grandes sociétés de Hollywood produisent, distribuent leurs films et contrôlent la quasi-totalité de l’exploitation. Les «indépendants» ont été presque entièrement éliminés. Ce processus s’est effectué sans intervention de l’État. Les sociétés se sont spontanément constituées en 1930 en pouvoir corporatif par la création de la Motion Picture Association of America (M.P.A.A.). Le gouvernement fédéral a fait jouer la législation antitrust contre les abus de pouvoir de ce groupement; en 1948, la Cour suprême a obligé les compagnies à choisir entre production et distribution ou propriété des salles de projection. Le gouvernement fédéral n’intervient par l’intermédiaire de la Motion Picture Division du département du Commerce que dans l’exportation des films américains. La liberté commerciale est complète au stade de l’exploitation.En Grande-Bretagne se manifestent les mêmes tendances qu’aux États-Unis, avec une pénétration très aisée des films américains sur le marché britannique. Le Cinematograph Film Act de 1927 a exigé le dépôt au Board of Trade de tous les films afin de permettre la vérification de leur nationalité; modifiée en 1938, cette loi permet aujourd’hui au Board of Trade de contrôler les circuits de salles, les entreprises de distribution et les studios, et d’empêcher ainsi des concentrations plus poussées; depuis 1948, une licence est exigée pour ouvrir une nouvelle salle et un régime de contingentements à l’importation a été établi, qui protège le cinéma britannique.En Allemagne, avant la Seconde Guerre mondiale, l’industrie cinématographique était caractérisée par une extrême concentration, tant verticale qu’horizontale. À la décartellisation et à la déconcentration opérées par les Alliés en Allemagne de l’Ouest (1946-1950) a fait suite la politique des autorités de la république fédérale d’Allemagne (loi du 5 juin 1953): l’exercice des professions cinématographiques est libre; mais l’ouverture et l’exploitation des salles sont soumises à déclaration et à autorisation; la production reste cependant fortement concentrée.Le cinéma aidé et contrôléLa situation des entreprises de production et d’exploitation cinématographiques a beaucoup évolué en France depuis les origines.Un régime de liberté totale a existé jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, à l’exception, depuis 1928, de la déclaration obligatoire de l’ouverture ou du transfert de propriété des salles. En 1940 fut créé le Comité d’organisation de l’industrie cinématographique, organisme corporatiste placé sous l’autorité du ministre de l’Information; toute personne qui voulait exercer une profession cinématographique devait en être membre et ne pouvait le devenir que par autorisation ministérielle; le comité dirigeait l’économie et assurait la discipline de la profession; tout autre organisme professionnel était interdit.La législation actuelle porte des traces de cette période. Certes, la liberté d’association sur une base professionnelle est rétablie, mais la loi du 25 octobre 1946 crée le Centre national de la cinématographie. Cet établissement public, dont le directeur général est nommé par décret, est placé sous la tutelle du ministre chargé de la Culture. Ses attributions sont de trois ordres; d’une part, il conseille les pouvoirs publics et prend les décisions réglementaires s’imposant à la profession; d’autre part, il assure la gestion d’un service public: à ce titre, il contrôle le financement et les recettes, octroie des subventions d’aide au cinéma, administre des services interprofessionnels et contrôle des organismes privés, tels le Festival international du film de Cannes, Unifrance Film (société de diffusion du film français), la Cinémathèque française, l’Institut des hautes études cinématographiques. Enfin, il exerce des attributions disciplinaires: en cas d’infractions aux décisions de son directeur général, il peut infliger à ses ressortissants des sanctions (amende, interdiction, fermeture d’entreprise).Les professions réglementées sont celles de producteur et distributeur de films et d’exploitant de salle. L’accès à ces professions est soumis à l’autorisation du directeur général du C.N.C. L’exercice de la profession est également réglementé: le producteur doit obtenir une autorisation de tournage pour chaque film qu’il a l’intention de réaliser; l’exploitant de salle n’a pas liberté de composer ses programmes, ni celle de s’approvisionner en billets ou de fixer le prix des places; il est obligé de déclarer ses recettes, qui sont contrôlées; il doit respecter des règlements de sécurité.D’une structure de l’industrie cinématographique caractérisée à l’origine par la prolifération d’entreprises de production et d’exploitation, on est passé, à la fin des années soixante, en raison de la crise provoquée essentiellement par la télévision, à une intégration oligopolistique de l’exploitation à la production. Pour y faire échec, la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle consacre son titre V (art. 88 à 92) à la diffusion des œuvres cinématographiques. Ces dispositions visent à éviter les obstacles à la libre concurrence et à la plus large diffusion des œuvres conformément à l’intérêt général. Un décret du 4 janvier 1983 fixe le délai (un an, de droit commun) pendant lequel les œuvres exploitées en salles ne peuvent être exploitées simultanément en vidéocassettes et vidéodisques. Un décret du 10 janvier 1983 réglemente les groupements de programmation des salles lorsque celle-ci n’est pas assurée directement par les entreprises propriétaires du fonds de commerce; ces groupements sont soumis à l’agrément d’une commission de la programmation auprès du directeur général du C.N.C., et au contrôle du directeur général. Un décret du 9 février 1983 définit les conditions de nomination, de saisine et de prononcé des décisions du médiateur du cinéma créé par l’article 92 de la loi du 29 juillet 1982, et dont la fonction est d’assurer la conciliation préalable dans les litiges relatifs à la diffusion en salles, qui ont pour origine des obstacles faussant le jeu de la concurrence.2. Le droit de la production et de l’exploitation cinématographiquesLa production et l’exploitation des films de cinéma posent deux problèmes principaux: la censure et le crédit. Le développement des relations internationales a récemment soulevé le problème de la coproduction.La censure cinématographiqueLa liberté d’expression, généralement accordée au théâtre et à la presse, est refusée au cinéma. Sous aucun régime la censure n’est inexistante. Elle peut porter sur la réalisation du film ou sur sa projection.En régime socialiste, le problème ne se pose pas: les réalisateurs du film dépendent d’entreprises publiques et doivent donc se conformer à l’orientation idéologique des pouvoirs publics: les salles ne peuvent projeter que des films agréés par les entreprises publiques de distribution.Dans les États à régime libéral, le système de censure oscille entre les contrôles officiels et l’autocensure; cette dernière n’est parfois pas moins rigoureuse que la censure publique. Aux critères traditionnels, moraux et politiques, sont venues s’adjoindre, au début des années soixante-dix, les dispositions conditionnées par le développement des productions de films pornographiques.L’autocensureAux États-Unis, la M.P.A.A. s’est donné en 1930 une réglementation interne en application d’un code de moralité professionnelle, dit «code Hays», qui précisait la liste des thèmes à exclure, et dont l’esprit général était de proscrire tout film risquant d’abaisser le «niveau moral» des spectateurs; elle délivrait des visas aux producteurs en application de ce code. La Cour suprême décida en 1953 que la censure préalable par les autorités d’un État ou d’une ville constituait une atteinte grave à la liberté d’expression, et que seules des circonstances exceptionnelles pouvaient la justifier. Mais, avec l’accroissement de la production de films «obscènes», la Cour suprême revint sur sa jurisprudence et, en 1973, décida que l’on «pouvait prendre en compte les critères dominants de la moralité au sein des collectivités locales plutôt que de la considérer sur le plan national».En république fédérale d’Allemagne, la liberté d’expression cinématographique est garantie par l’article 5 de la loi fondamentale du 23 mai 1949, sous réserve des dispositions répressives; le film ne doit ni heurter les conceptions religieuses, ni favoriser les tendances nationales-socialistes, militaristes, impérialistes, racistes, ni compliquer les relations internationales de l’Allemagne avec les autres États, ni violer les bases constitutionnelles de l’État fédéral, ni fausser les faits historiques; ces dispositions sont garanties a priori par une autocensure de la profession.Les censures officiellesEn Grande-Bretagne une censure est exercée depuis 1912 par le British Board of Films Censors , collège de censeurs nommés par le gouvernement, mais indépendants de lui: aucun film britannique ou étranger ne peut être projeté sans le visa de cette commission. En 1977, le cinéma a été soumis à l’Obscene Publications Act de 1959, dont l’interprétation est variable selon les usages des juridictions locales.En Italie, où depuis la Constitution de 1947 le contrôle préalable n’existait pas, les films étaient soumis à la juridiction répressive qui, dans certaines régions, pouvait être très rigoureuse et dont la décision avait force obligatoire sur tout le territoire de la République. Une loi de 1962 instituant auprès du Premier ministre une commission de contrôle pouvant interdire les films ou en restreindre la vision aux personnes de plus de dix-huit ou de quatorze ans, système assez semblable au système français, fut donc accueillie favorablement par la profession.Le régime français de la censureEn France, le système de censure est particulièrement compliqué. Il y a d’abord une censure centralisée au stade de la production, qui peut porter sur l’autorisation de projection du film, ou son classement «pornographique» (qui lui fait supporter de lourdes charges financières). Ensuite s’ajoutent les censures communales au niveau des salles d’exploitation.Depuis 1919, aucun film ne peut être projeté s’il n’a reçu un visa ministériel. Depuis un décret du 18 janvier 1961, le ministre statue sur avis d’une commission de contrôle des films cinématographiques, sans être lié par cet avis. La commission comprend les représentants des ministres intéressés, ceux des organismes professionnels et des groupements qualifiés, ainsi que diverses personnalités. Elle propose soit d’autoriser le film, soit de l’interdire, totalement ou seulement aux mineurs de treize ans, de dix-huit ans, ou à l’exportation (cette dernière interdiction n’ayant plus été prononcée depuis 1970). Les motifs de refus du visa ne sont pas précisés dans le texte actuel, mais on peut se référer à un décret du 7 mai 1936 qui invoquait «l’ensemble des intérêts nationaux en jeu et spécialement l’intérêt de la défense des bonnes mœurs et du respect des traditions nationales». La décision du ministre est susceptible de recours direct en annulation depuis 1978 devant le Conseil d’État, qui, dès 1975, avait reconnu sa compétence pour apprécier si la décision était conforme à une conciliation entre les intérêts généraux et le respect dû à la liberté d’expression.Le décret de 1961 dispose: «Le visa d’exploitation vaut autorisation de représenter le film sur tout le territoire pour lequel il est délivré.» Cette affirmation est exagérée, car les censures locales peuvent annihiler l’effet de tout visa. En effet, les maires doivent à leur pouvoir général de police la possibilité d’interdire sur le territoire de leur commune la projection de tout film susceptible de troubler l’ordre public. Les décisions des maires peuvent faire l’objet de recours devant les juridictions administratives. Ces décisions ont été nombreuses depuis 1950, et les recours introduits presque aussi nombreux. La jurisprudence du Conseil d’État permet de délimiter le champ de ces censures locales, de moins en moins nombreuses du fait de la concentration des salles dans les villes grandes et moyennes. Pour justifier l’intervention de police du maire, le Conseil d’État prend en considération non seulement les troubles sérieux de l’ordre public, mais aussi le caractère immoral du film, apprécié en fonction de circonstances locales. Mais, depuis la fin des années soixante, le Conseil d’État accorde aux distributeurs de films victimes d’interdictions locales abusives des dommages et intérêts à la charge des communes, ce qui peut être de nature à freiner les censures locales.En outre, depuis la loi de finances du 30 décembre 1975, le ministre, sur avis de la commission de contrôle, peut classer les films «pornographiques ou d’incitation à la violence», dits «X». La décision peut être soumise au contrôle du Conseil d’État, qui peut définir dans chaque cas si le film présentait ou non les caractéristiques prévues par la loi de 1975 et le décret d’application du 6 janvier 1976. Les conséquences du classement X sont, outre l’interdiction aux mineurs, des pénalisations fiscales et financières. En effet, la taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux majoré sur les cessions de droits portant sur ces films; un prélèvement de 20 p. 100 est opéré sur les bénéfices industriels et commerciaux réalisés à l’occasion de toute opération portant sur ces films; enfin, le droit de timbre est maintenu sur les billets de ces spectacles, alors que les autres spectacles cinématographiques en sont exonérés. Les films X subissent aussi une pénalisation financière concernant les crédits dont ils pourraient bénéficier selon un statut normal.Le crédit à l’industrie cinématographiqueLa longue période qui s’écoule de la préparation du film à la fin de son exploitation normale (quatre ou cinq années) implique nécessairement un large recours au crédit. Des techniques juridiques ont été aménagées pour faciliter le recours au crédit privé et pour assurer un crédit public.En dehors de l’appel aux banques spécialisées, les sources traditionnelles du crédit cinématographique sont les crédits consentis aux producteurs par les distributeurs et exploitants: il s’agit d’une avance pure et simple à valoir sur les recettes du film, ou d’une avance qui constitue un minimum de recette garanti par le distributeur. Pour donner aux créanciers des garanties réelles et faciliter ainsi la collecte des capitaux nécessaires à la production, le législateur français (loi du 22 février 1944) a institué un registre public de la cinématographie qui joue le rôle de la conservation des hypothèques en matière immobilière: tous les actes juridiques contractuels concernant un titre de film déposé doivent faire l’objet d’une inscription. Les effets de l’inscription sont l’opposabilité aux tiers de tous actes déposés et surtout l’établissement sans dépossession du privilège résultant du contrat de nantissement.La production et l’exploitation des films peuvent bénéficier en France de l’assistance financière publique établie lors de la crise que le cinéma a subie au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Il s’agit essentiellement d’un autofinancement par le canal du compte de «soutien financier de l’industrie cinématographique», qui figure au budget de l’État. Institué par le décret du 16 juin 1959 (faisant suite à des institutions mises en place en 1948 puis en 1953), le compte tire ses ressources d’une taxe spéciale additionnelle aux prix des billets d’entrée dans les salles de cinéma et d’une taxe de sortie des films – taxe proportionnelle à leur métrage. Il est notamment destiné à financer en partie la production de nouveaux films français de long métrage, ainsi qu’à concourir à des travaux de construction ou d’amélioration de salles de cinéma.En Italie, un régime assez analogue à celui de la France a été mis en place par la loi du 26 juillet 1949: 1 p. 100 de la recette brute de chaque film est affecté à la constitution d’un fonds d’aide au film italien, mais – différence importante – le réinvestissement n’est pas obligatoire.La coproduction cinématographiqueAprès la Seconde Guerre mondiale est né un droit international du cinéma. Des accords de coproduction ont été signés par les autorités de divers pays; ils constituent en fait des traités portant sur la nationalité des films. Dans le cadre de ces accords, des producteurs de deux ou plusieurs pays signent des contrats de coproduction. Le but des accords est de donner plusieurs nationalités à un même film qui, étant ainsi considéré comme film national, ne sera pas soumis à des contingentements. D’autre part, la coproduction internationale facilite la solution des problèmes de financement en ouvrant plus largement les marchés potentiels.Évidemment, l’octroi d’une double nationalité a souvent pour conséquence de sacrifier l’aspect culturel du film à son aspect purement commercial. Le film est conçu pour toucher des publics hétérogènes, et ses réalisateurs tendent à la simplification. Aussi, les coproductions de qualité ne sont possibles qu’entre industries cinématographiques ayant atteint un degré de développement artistique et technique équivalent; sinon, elles se font au détriment d’un des pays y participant.Les premiers pays européens ayant signé de tels accords sont la France et l’Italie (accord du 19 octobre 1949 renouvelé plusieurs fois). Leurs coproductions ont souvent été de grands succès.La crise a suscité depuis 1974, à l’initiative de la France, des congrès patronnés par le Conseil de l’Europe en vue de la création d’un bureau européen du cinéma. Mais une structure unitaire n’est pas aisée à réaliser, car les divers systèmes nationaux des autres pays membres sont loin d’être aussi semblables que le sont entre eux les systèmes français et italien.3. Les droits d’auteur en matière cinématographiqueDepuis la signature à Genève, en 1952, de la Convention universelle sur le droit d’auteur, les services de l’U.N.E.S.C.O. essaient d’obtenir une concordance des règles conventionnelles concernant la protection internationale des œuvres cinématographiques. Des règles réciproques existaient déjà pour les pays adhérant à la convention de Berne (1886, dernière révision en 1971) sur le droit d’auteur. L’U.R.S.S. a adhéré en 1973 à la convention de Genève (révisée également en 1971). Les différences entre les deux conventions concernent essentiellement les dispositions propres aux pays en voie de développement, qui ont été insérées par ricochet dans la convention européenne ou «unioniste» de Berne.La révision, en 1976, de la loi des États-Unis sur le droit d’auteur ne les a pas conduits à adhérer à la convention de Berne. La loi nouvelle a établi un régime législatif fédéral excluant la Common Law et les droits des États, mais n’a pas apporté d’innovations en matière cinématographique.Les problèmes de droits d’auteur ne sont d’ailleurs que très partiellement tranchés par les conventions internationales, et, même dans les pratiques nationales, de nombreuses atteintes au droit d’auteur peuvent être relevées (copies mises au pilon, par exemple).Problèmes non abordés par les conventions internationalesLes législations nationales, très différentes les unes des autres, classent toujours l’œuvre cinématographique parmi les œuvres littéraires ou artistiques. Mais les unes considèrent le film comme une œuvre collective (le producteur pouvant être considéré comme l’unique auteur), d’autres comme une œuvre de collaboration. Des divergences existent quant à la détermination des auteurs du film, au droit moral, au droit des interprètes.La détermination de l’auteur ou des auteurs du film est d’autant plus discutée que la convention de Berne n’en traite pas. La divergence entre les législations internes est considérable. La thèse du producteur-auteur triomphe dans les pays anglo-saxons, le film étant considéré comme œuvre de commande; il en est pratiquement de même en Allemagne ou aux Pays-Bas et dans de nombreux pays européens de l’Est. La thèse de l’auteur-créateur intellectuel (adoptée en Belgique, Italie, France) conduit à reconnaître, non pas un auteur, mais plusieurs auteurs à l’œuvre filmée. La loi française du 11 mars 1957 (comme la loi italienne) considère comme auteur la ou les personnes physiques qui réalisent la création intellectuelle de l’œuvre; sont présumés coauteurs: le réalisateur et les auteurs du scénario, de l’adaptation, du texte parlé et de la musique spécialement composée.En Allemagne, en Italie et en France est reconnu, en faveur des créateurs intellectuels, le droit moral, droit d’exiger que leur création ne soit divulguée qu’avec leur consentement, que leur nom soit inséparablement lié à l’œuvre cinématographique achevée et que celle-ci conserve son intégrité. Aux États-Unis et en Grande-Bretagne, le droit moral est ignoré en tant que concept autonome. Les législations d’Europe orientale le consacrent également.Le droit des interprètes de films semble relever, dans la plupart des législations, plutôt du droit du travail que du droit d’auteur. Certains systèmes juridiques accordent aux interprètes un droit d’auteur à part entière (Japon, Mexique), d’autres un certain droit moral (France), d’autres un droit d’adaptateur (Allemagne), d’autres un droit connexe (Italie, assimilant ce droit à un droit du travail); aux États-Unis, les tribunaux leur accordent un certain droit moral.Conventions internationales et protectionSi les problèmes de détermination d’auteurs et de droit moral sont ignorés par les conventions internationales, les problèmes d’adaptation à l’écran d’une œuvre antérieure, ceux que posent les œuvres cinématographiques protégées, la durée de la protection ont été résolus.L’adaptation à l’écran d’une œuvre antérieure (roman, pièce de théâtre) est l’un des problèmes les mieux résolus: l’article 14 de la convention de Berne accorde aux auteurs le droit exclusif de consentir à l’adaptation cinématographique de leur œuvre. Mais le contrôle que l’auteur de l’œuvre adaptée peut exercer sur le film présente des difficultés; dans les pays anglo-saxons, qui ignorent le droit moral, il est difficile à organiser; dans certains pays «unionistes», le point de savoir si les auteurs de l’œuvre adaptée sont coauteurs du film est controversé: ainsi, en Allemagne, où manuscrit, scénario et musique sont considérés comme œuvres préexistantes, le film est toujours une œuvre dérivée.Les œuvres cinématographiques protégées, malgré le caractère très général des conventions de Genève et de Berne, ne sont pas les mêmes dans toutes les législations. En Allemagne, en Autriche, en Italie, la loi distingue les productions et les créations cinématographiques, ne protégeant que ces dernières. En Grande-Bretagne, seuls les films de fiction bénéficient d’une protection complète.La durée de la protection fait l’objet d’une réglementation: la convention de Berne distingue œuvres adaptées et œuvres cinématographiques originales; les premières sont soumises au délai uniforme de cinquante ans, les secondes abandonnées aux législations internes. Pour celles-ci, la durée de protection varie de dix ans dans certains pays d’Europe orientale à vingt-cinq ans aux États-Unis et cinquante ans en Allemagne, en France et en Grande-Bretagne.
Encyclopédie Universelle. 2012.